
Le Chien Marcel
Et qu’est-ce qu’il est devenu le chien Marcel ?
Il était sympathique le chien Marcel, il était beau le chien Marcel, et surtout Romy Schneider nous en avait persuadé…
Dans « Le Vieux Fusil » que je viens de revoir (oui parce qu’il repasse tous les 2 ou 3 ans sur les chaînes françaises, et à chaque fois je me dis : mais non je vais pas encore me le retaper, ça fait 10 fois ; et ben si…), le chien qu’elle a baptisé Marcel après l’avoir recueilli au bord de la route, en rajoutait encore dans la fraîcheur, la spontanéité, le charme déstabilisateur du personnage qu’elle jouait. Et par conséquent en rajoutait dans l’horreur de la situation, quand après elle se fait cramer au lance-flammes après avoir été violée par les nazis.
Film dur, qui n’a rien perdu de sa force autant pour les images difficiles que durant les passages les plus éthérés, comme la sublime scène du coup-de-foudre entre Philippe Noiret et donc, Romy Schneider, d’une émouvante réserve et d’une pudeur étonnante qui tranche tellement avec les terribles scènes qui ont précédé. Noiret en médecin débonnaire, un peu pataud et rondouillard, qui a muté en archange de la mort, d’autant plus terrifiant dans sa froide détermination à massacrer les SS qui ont torturé sa femme et sa fille.
Et le chien Marcel alors ? On suppute, on subodore, même s’il est une victime collatérale. Car nous aussi on l’a oublié au fur et à mesure du visionnage. On croirait même à un rattrapage du scénario alors que le film touche à sa fin, et qu’au beau milieu des FFI qui ont finalement investi la place, Noiret-Dandieu déclare dans la voiture à son ami venu le chercher « Qu’est-ce qu’il est devenu le chien Marcel ? », comme si le tragique de la situation pouvait être émoussé par une question peut-être légitime, mais plutôt superflue.
Eh bien à l’instar de Noiret, moi aussi, 45 ans après avoir vu ce film la première fois, je me pose encore la question : qu’est-ce qu’il a pu devenir le chien Marcel ? Je le cherche toujours à chaque rediffusion du film, et suis toujours déçu qu’il ne surgisse pas à la fin ; car il s’était probablement planqué lui aussi pour échapper à la barbarie, mais, bon, un chien reste un chien, alors on lui aurait peut-être pardonné. Je lui aurais presque trouvé des excuses, 45 ans après, s’il était revenu.
Il y a des films qu’on reverra pour de multiples raisons. Celle-là n’est pas la principale, mais il se forme dans certains re-visionnages des envies de modification de l’histoire, qu’on souhaiterait voir se métamorphoser sous nos yeux. Des petites choses connexes au grand drame initial, pour nous consoler.
Ça se passe parfois comme ça aussi avec les gens. On reste sur des positions tranchées, définitives, on les met dans des bocaux sur des étagères, car c’est plus sécurisant. Et puis les gens disparaissent, de la ville, de la région, ou de leur propre existence. De notre vie finalement. Et il est alors toujours trop tard… Un film de plus dans la mémoire.
Tu fais chier, Marcel, de ne pas revenir…